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Les “prières” de Marion Tampon-Lajarriette 


Jean-Paul Gavard-Perret
Les Blogs de l’art helvétique contemporain,  11.2018


Marion Tampon-Lajarriette interroge le méta-langage des images afin de comprendre leur charge implicite dont elles sont porteuses en chaque société. Reprenant le technique du cyanotype pour son empreinte bleue crée par l’exposition au soleil d’une solution chimique, elle propose des "marées du soir" ("Eventide") au moment où le jour prend une sorte d'évanescence. Celle-ci devient tactile d'autant que la créatrice met l’accent sur les mains qui "font" nos gestes du quotidien.

Sur des pages nues d’un cahier de croquis, ces mains reproduites deviennent vaporeuses et mystérieuses. Elles rameutent de l'invisible. La vidéo Hot Marble et la sculpture Echo renforcent ce jeu de caresses indicibles. Une sidération est réitérée mais en effluve. Les jeux de mains ne font pas celui du vilain : ils caressent nos regards étonnés d'un mouvement presque endormi d'où jaillit un tropisme particulier.

L'artiste crée de l’exactitude infixable porteuse de fiction donc de vérité. Il s’agit toujours de faire surgir du réel à inscrire dans une fable voire en faire le personnage d’une intrigue. Soudain l’émotion entre en jeu, s’y retrouve une épaisseur étrange. S’y reconnait aussi ce qui est absent et soustrait au moment même de la présence. L’œuvre réserve donc une dimension mystique au sein même du réel. Refusant toute trivialité et selon plusieurs systèmes de création l’artiste engouffre dans l’aire de l’impalpable mais dont l’antre de la chair est le corollaire ou la racine. L’affect n’est donc pas stigmatisé. Toutefois, au lieu de suppurer, il acquiert une dimension d'élévation en fragments d’éternité.